F-X Gunepin, H Common, A Tronchot, P Guillemot, M Ropars
(Lorient)
Les lésions multi-ligamentaires du genou restent rares. Leur prise en charge représente un challenge complexe y compris pour les équipes rompues à cette chirurgie. En-effet il faudra savoir gérer l’urgence : complications vasculaire, neurologique et ou cutanée (jusqu’à 30 % des cas au total) puis élaborer la stratégie de prise en charge ligamentaire. Cela impose des choix techniques et de gestion des greffes. Le recours aux allogreffes permet de préserver le capital tendineux du patient mais leurs disponibilités restent aujourd’hui inférieures aux besoins.
Nous utilisons la description des luxations du genou de P Neyret et S Boisgard pour comprendre les mécanismes et planifier notre stratégie chirurgicale mais nous utilisons également la classification de Schenck, synthétique et systématiquement citée dans la littérature, pour le recueil des données. Les auteurs décrivent une technique de prise en charge des atteintes combinées du pivot central et du point d’angle postéro-latéral développée au CHU de Rennes. Cette technique peut être utilisée pour les lésions type KD IIIL* et KD IV mais aussi pour les KD I associant une lésion du ligament croisé antérieur (LCA) et le ligament collatéral latéral (LCL).
* La classification de Schenk est une classification des luxation de genou (KD pour Knee Dislocation :
- KD I : Luxation avec atteinte d’un seul ligament croisé (LCAE + LCL par exemple)
- KD III L : Atteinte bicroisée et du plan latéral
- KD IV : Atteinte bicroisée et plans latéral et médial
Le symposium de la SFA co-dirigé par S Plaweski et Ph Boisrenoult sur les lésions postérolatérales du genou de l’adulte (Bordeaux 2003), avait parfaitement démontré que :
- – La prise en charge des lésions ligamentaires doit être la plus précoce possible (moins de 45 jours, voire même avant 3 semaines si possible)
- – La reconstruction des lésions ligamentaires est supérieure à la simple réparation
La brillante étude anatomique de P Boisrenoult décrivait 3 plans :
- – Un plan superficiel avec : le tenseur du fascia lata, le biceps et le nerf fibulaire commun (NFC)
- – Un plan intermédiaire avec : le ligament collatéral latéral (LCL) et le gastrocnémien latéral
- – Un plan profond avec : le tendon poplité (TP), le ligament poplitéo-fibulaire (LPF), le ménisque latéral et ses fibres poplités.
Nous nous sommes également inspirés de la conférence d’enseignement de P Djian sur le point d’angle postéro-latéral qui effectue une mise au point détaillé des techniques de reconstruction des différentes lésions ligamentaires. Il insiste sur l’importance d’une reconstruction:
- Du tendon poplité (TP)
- Du ligament poplitéo-fibulaire (LPF)
- Du ligament collatéral latéral (LCL)
Deux principales techniques permettent la reconstruction de ces structures : la technique « Versaillaise » et la technique de Laprade. Ces 2 techniques font appel aux deux ischiojambiers (Semi-tendineux et Gracilis) ou à des allogreffes. Ces techniques imposent la réalisation de 2 tunnels fémoraux (insertion du Tendon poplité et du ligament collatéral latéral) qui seront proche l’un de l’autre et proche du tunnel de la plastie du LCA . La prise en charge de ces lésions nécessite donc :
- Un abord suffisant pour une exposition optimale de la zone traumatisée
- Une gestion économe des greffes
- – Des choix techniques qui autorisent la réalisation de plusieurs tunnels dans un petit périmètre.
Nous utilisons régulièrement la technique de JH Jaeger, que C Lutz nous a enseigné, pour des chirurgies de reprise du LCA. L’abord latéral élargi est donc une pratique maitrisée par l’équipe. Elle permet dans un même temps le prélèvement du fascia pour la reconstruction du LCA en y associant une ténodèse, facteur de contrôle de la rotation interne. Afin de ne pas avoir à prélever une trop grande largeur de fascia, nous prélevons une bandelette de 10 mm de large sur toute la longueur du prélèvement que nous augmentons avec le gracilis.
Le tunnel fémoral est alors voisin des 8 mm. Pour la reconstruction postérolatérale, nous utilisons la technique de Laprade, cependant, un tunnel borgne tibial rétrograde permet de n’utiliser que le semi-tendineux en simple brin replié à ses extrémités qui possède déjà un diamètre équivalent aux insertions du LCL et du TP (respectivement environ 4 et 5 mm de diamètre). Il est donc plus simple de réaliser 3 tunnels de petit diamètre à la face latéral du condyle latéral. (figure 1) Nous avons également appris de P Colombet que les endo boutons réglables sont à même d’assurer une fixation de qualité. C’est notre choix pour éviter les vis dans un volume d’os réduit, et pour réduire également la taille des tunnels.
Ainsi notre technique comporte :
- – Un LCA reconstruit par le tenseur du fascia lata (Technique Jager/Lutz) bandelette de 10 mm augmentée d’un gracilis plié en deux.
- – Une reconstruction du LCL, TP et LPF (Technique Laprade) mais avec le seul DT en Y. La fixation tibiale est assurée par un endo bouton sur tunnel borgne. Les faisceaux fémoraux (TP et LCL) sont également fixés par endo-bouton sur tunnels borgnes indépendants. Le LPF est fixé dans la tête fibulaire par une vis résorbable) (figure 2)
- – Le LCP peut être reconstruit, en l’absence d’allogreffe par le tendon quadricipital (TQ
Multi-ligament knee injuries remain rare. Their management represents a complex challenge, even for teams experienced in this type of surgery. Indeed, it is necessary to handle the emergency phase, including vascular, neurological, and/or skin complications (occurring in up to 30% of cases), followed by developing a ligamentous treatment strategy. This requires making technical choices and managing grafts. The use of allografts helps preserve the patient’s tendon resources, but their availability remains lower than the current demand. We use the knee dislocation classification by P. Neyret and S. Boisgard to understand injury mechanisms and plan our surgical approach. Additionally, we rely on Schenck’s classification, which is widely cited in the literature for data collection. The authors describe a surgical technique developed at CHU Rennes for treating combined injuries of the central pivot and the posterolateral corner. This technique is applicable for KD III L and KD IV injuries, as well as for KD I injuries involving both the anterior cruciate ligament (ACL) and lateral collateral ligament (LCL). Schenck’s Knee Dislocation (KD) Classification: KD I: Dislocation involving a single cruciate ligament (e.g., ACL + LCL) KD III L: Bicruciate injury with lateral involvement KD IV: Bicruciate injury involving both lateral and medial structures A SFA symposium (co-directed by S. Plaweski and Ph. Boisrenoult in Bordeaux, 2003) highlighted key principles for managing posterolateral knee injuries in adults: Early ligamentous repair is essential (preferably within 45 days, ideally before 3 weeks). Ligament reconstruction is superior to simple repair. Anatomical Study by P. Boisrenoult : This study described three key structural planes: Superficial layer: Tensor fasciae latae, biceps femoris, and common peroneal nerve (CPN). Intermediate layer: Lateral collateral ligament (LCL) and lateral gastrocnemius. Deep layer: Popliteus tendon (PT), popliteofibular ligament (PFL), and lateral meniscus with its popliteal fibers. We also incorporated insights from P. Djian’s teaching conference on posterolateral corner injuries, which emphasized the importance of reconstructing: Popliteus tendon (PT) Popliteofibular ligament (PFL) Lateral collateral ligament (LCL) Two primary techniques allow for reconstructing these structures: The « Versailles » technique and LaPrade’s technique. Both techniques utilize either semitendinosus and gracilis tendons or allografts. They require the creation of two closely positioned femoral tunnels (for popliteus tendon and LCL insertions), near the ACL graft tunnel. Key Considerations for Surgery Managing these injuries requires: Adequate exposure of the injured area. Efficient graft utilization to avoid unnecessary harvesting. Technical choices that allow multiple tunnels to be drilled within a small area. We frequently employ the JH Jaeger technique, as taught by C. Lutz, for ACL revision surgeries. The extended lateral approach is well mastered by our team, as it allows simultaneous fascia harvesting for ACL reconstruction, combined with a tenodesis to control internal rotation. To minimize excessive fascia harvesting, we take a 10 mm-wide strip along its full length, reinforced with the gracilis tendon. The femoral tunnel diameter is about 8 mm. For posterolateral reconstruction, we use LaPrade’s technique. However, we incorporate a retrograde blind tibial tunnel, allowing us to use a single-stranded semitendinosus tendon, folded at its ends. This tendon has a natural diameter matching the LCL and PT insertions (approximately 4-5 mm in diameter), simplifying the creation of three small-diameter tunnels on the lateral femoral condyle. Fixation Strategy : We have also learned from P. Colombet that adjustable endobuttons provide excellent fixation. We favor this method to:
Avoid screws in limited bone volume. Reduce tunnel size while maintaining strong fixation. Summary of Our Technique ACL reconstruction: Using a 10 mm fascia lata strip, reinforced with a doubled gracilis tendon (Jaeger/Lutz technique). LCL, PT, and PFL reconstruction: Using a semitendinosus tendon (LaPrade technique). Tibial fixation: Endobutton on a blind tunnel. Femoral fixation: Independent endobuttons on blind tunnels (for PT and LCL). Fibular head fixation: Resorbable screw for the PFL. PCL reconstruction: If no allograft is available, quadriceps tendon (QT) graft can be used. Référence : Comment prendre en charge une atteinte combinée du pivot central et du point d’angle postéro-latéral FRANÇOIS-XAVIER GUNEPIN, HAROLD COMMON, ALEXANDRE TRONCHOT, PIERRICK GUILLEMOT, MICKAËL ROPARS Maîtrise orthopédique n° 335 juin juillet 2024 https://www.maitrise-orthopedique.com/cp-bhrt-wtcp/