97. Conduite pratique dans les métatarsalgies. Principes chirurgicaux. Résultats - Usual practices and evolution in metatarsalgia. Surgical principles. Results

M Maestro (Monaco)


Les métatarsalgies sont parmi les plus fréquents des motifs de consultation en podologie ; 85% des métatarsalgies sont d’origine biomécanique ( causées par la surcharge de 1 ou 2 têtes métatarsiennes Thys and Coll 1974). Seules celles ci seront développées ici. Les métatarsalgies du premier rayon et de celles d’origine non strictement mécanique (maladie de Frieberg, de Morton, métaboliques, systémiques, infectieuses, neurologiques…), ne seront pas étudiés ici.

Ce sont des symptômes douloureux de l’avant- pied, associés à des troubles fonctionnels à type de difficulté pour la marche et à quelques signes physiques comme les callosités, la tuméfaction et la déformation d’un ou de plusieurs orteils. Derrière cette simplicité séméiologique se cache la complexité parfois extrême de leur cadre nosologique ainsi que la difficulté de leur évaluation et de leur traitement.

-1 Examen Clinique : Il faut pour les traiter convenablement, retrouver le cadre nosologique auquel elles s’intègrent et apprécier leur retentissement sur l’activité du patient. Seul, le fil conducteur de la biomécanique permets d’atteindre ces buts.

L’étude du caractère des douleurs et du siège des callosités permet de différencier les métatarsalgies statiques liées à des anomalies du deuxième pivot pendant la marche, aux métatarsalgies propulsives liées au troisième pivot.

Il semble que la surcharge des plaques plantaires puis leurs lésions marquent l’entrée dans la maladie « métatarsalgie ». Cette surcharge peut être due :

-À une insuffisance fonctionnelle et/ou anatomique du premier rayon (par exemple un hallux valgus ou une barchymétatarsie MT1),.

-À un métatarsien trop long qui subit trop de contrainte, alors qu’un métatarsien trop court est exclu de l’appui et transfère sur ses voisins.

-À des anomalies dans l’harmonie de longueur des métatarsiens.

-A des excès de pente métatarsienne

Il faudra pour intégrer les métatarsalgies dans leur cadre nosologique examiner le malade, couché (étude articulation par articulation, force,stabilité,mobilité) , debout et à la marche. Evaluer les rétractions des chaines musculaires postérieures, de l’appareil suro-plantaire et analyser son morphotype.

2-Cet Examen Clinique sera complété par des Examens paracliniques :

-Toujours des Radiographies en charge des deux pieds et incidences de ¾ médial pour apprécier la forme des têtes métatarsiennes Il faut donc pour comprendre et traiter les métatarsalgies :
Apprécier les anomalies du premier rayon.
Analyser l’harmonie des métatatarsiens latéraux entre eux grâce à l’analyse radiologique des trois principaux critères d’harmonie architecturale :

-Le rapport de longueur MT1/MT2

-La projection orthogonale par rapport au MT2 du centre de la tète du MT4 sur le centre du sésamoïde latéral.

-L’existence d’une progression géométrique de raison deux dans les différences de longueur relative des méta latéraux.

Ces anomalies de proportions sont bien corroborées aux anomalies cliniques et paracliniques.

– si besoin :

>Echographie dynamique des plaques plantaires en particulier, recherche d’un épanchement ou d’une synovite ou pour éliminer un Morton

>Scintigraphie,IRM , scanner

>Examen baropodométrique qui permettra de calculer l’impulsion (ITF) des différentes parties du pied ainsi que la synchronisation des forces et des appuis

>EMG

3-Principe du traitement chirurgical: soulager la ou les têtes en hyper-pression en redonnant une répartition harmonieuse des appuis et en restaurant la force d’appui pulpaire des orteils, condition idéale de la propulsion.
En pratique il faut être capable de traiter le ou les rayons atteints tout en tenant compte de la biomécanique de l’avant pied (harmonie de la parabole des têtes dans les 3 plans, recrutement en temps voulu de la surface portante des orteils et force propulsive de l’hallux)

3-1-Possibilités techniques de correction

-Au niveau des orteils
Raccourcissement phalangien
Arthroplastie inter phalangienne
Arthrodèse inter phalangienne

Au niveau des MtP
L’arthrolyse avec plastie des extensor digitorum brevis et longus
– Préférer le transfert du flector digitorum brevis sur P1 (G Pisani) qui garde la force d’appui pulpaire par rapport au transfert du flector digitorum longus (Gilderstone) qui sacrifie cette force d’appui
– La suture de la plaque plantaire
– L’arthroplastie en silicone
– L’ostéotomie de reaxation basale de P1 – la résection de la base phalangienne

– Au niveau des métatarsiens :
-Aujourd’hui la résection isolée d’une tête métatarsienne doit être proscrite.
-La résection des têtes et la condylectomie ne doivent plus être recommandées.
-Ce sont les ostéotomies basales, diaphysaires et distales qui depuis des décennies ont été décrites par dizaines, mais de réalisation souvent acrobatiques, difficiles et non fiables
Dans les métatarsalgies statiques il est logique d’élever la tête. « élévation concept »
Dans les métatarsalgies propulsives il est logique de raccourcir un ou des métatarsiens trop longs : « Shortening concept »
Parfois il faut raccourcir et élever
Quelle ostéotomie choisir ? Ajustement Millimetrique, respect de la vascularisation céphalique, Fiabilité, Facilité d’ostéosynthèse, Fusion rapide
Mise en charge immédiate en représente le cahier des charges

3-2-Indications chirurgicales

3-2-1-Il est logique de proposer une ostéotomie métatarsienne pour corriger une cause avec un défaut reconnu de longueur et/ou de pente métatarsienne. La correction sera effectuée sur le ou les métatarsiens concernés en prenant soin de préserver l’harmonie de la courbure des têtes (Barouk LS. Forefoot reconstruction – Paris : Springer Verlag Ed. 2003. )
3-2-2- Il est logique devant une métatarsalgie associée à un hallux valgus instable et sans anomalies morphologique osseuse et articulaire de la palette et des orteils, de ne proposer que le traitement de l’hallux valgus et de garder une indication d’ostéotomie métatarsienne que secondairement (LeeKB.;Park JK.;Seo HY.;Kim MS., prognosis of painfull plantar callosity after HV correction without lesser metatarsal osteotomy, Foot & Ankle Intern. 2009;30:1048-1052)
3-2-3- Devant un avant pied déstructuré ou devant une lésion dont la correction seule est incompatible avec un avant pied structurellement équilibré, il est logique de proposer une reconstruction des 5 rayons. Les ostéotomies seront associées si besoins à des gestes de corrections sur les lésions associées (MtP, orteils)(MaestroM., Besse JL.,Ragusa M.,Berthonnaud E., Forefoot morphotype study and planning method for forefoot osteotomy, Foot Ankle Clin N Am2003 ;8 : 695- 710)
3-2-4- Les autres cas en particulier iatrogéniques, doivent être appréciés et évalués en particulier en s’aidant de la baropodométrie
3-2-5- si une cause haute est mise en évidence , elle sera corrigée en premier lieu ou en association si des geste doivent être fait sur l’avant pied pour corriger des désordres structurels

4-Résultats

-Des ostéotomies diaphysaires type Helal: de nombreuses études ont montré un taux de récidives et de complications inacceptables et de ce fait ces ostéotomies ne sont pas à recommander.

-Des ostéotomies distales per-cutanées (DMMO) réalisées à la fraise recommandées chez les sujets à vascularisation précaires, dans les métatarsalgies iatrogéniques ou en première intention. Dans ce dernier cas le traitement d’un seul rayon n’est pas recommandé. Leurs résultats sont prometteurs mais en cours d’évaluation

– Des ostéotomies distales : actuellement l’ostéotomie de Weil correctement réalisée par mini-abord transverse et en particulier avec un désépaississement dans le trait dès 4mm de recul est une ostéotomie fiable et efficace et reproductible. On peut espérer un taux de réussite autour de 85%. De nombreuses variantes ont été décrites.
Toute fois on note un taux de récidive des luxations MtP de 12% (TrnkaHJ.;Gebhard C;MuhlbauerM.;Ivanic G.;Ritschl P . the weil osteotomy for treatment of dislocated metatarso-phalangeal joints:good outcome in 21 patients with 42 osteotomies . Acta Orthopedica Scand 2002.73(2):190-194 )et un taux d’orteils flottants de 20% à 38% aggravé si une arthrodèse IPP est associée (Migues A.;Slullitel G.;Bilbao F.;Carrasco M.;Solari G. ; floating-toe deformity a complication of the Weil osteotomy ; Foot & Ankle Intern. 2004;25:609-613)

5-Conclusion

Les techniques conservatrices utilisées actuellement, correctement indiquées et réalisées présentent toute au moins 10% de résultats insatisfaisants. Nous devons continuer à progresser par les études cliniques et les études fondamentales en particulier en développant des outils de simulation des conditions pathologiques et de leurs corrections.

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